Corinne Cantegrel, une femme de conviction

Albigeoise, gynécologue, Corinne Cantegrel est une fervente défenseuse des droits de la femme. Un engagement de toute une vie.
Corinne Cantegrel, une femme de conviction

Il est parfois utile de se rappeler que la défense des droits des femmes a été un combat de fond pour obtenir de réelles avancées et faire changer les mentalités. Ce n'est qu'en 1967, par exemple, que la loi Neuwirth légalise la contraception et l'usage de la pilule. Cette loi allait changer la vie de millions de femmes en France. Quelques mois plus tard, le mouvement de contestation politique, sociale et culturelle de mai 68 exprimait dans la rue cette volonté de liberté qui allait préparer le terrain à l'engagement de Simone Weil et à la loi sur l'avortement.

« J'ai été influencée par le mouvement féministe de cette époque », reconnaît Corinne Cantegrel. « Très tôt, j'ai voulu agir pour la liberté des femmes, les aider à choisir, à s'épanouir et à ne pas angoisser devant l'avenir. Ça a été le fil rouge de ma vie. » Dès l'âge de quatorze ans, elle sait qu'elle s'orientera dans cette voie. Après le bac, elle rejoint les bancs de l'école de médecine à Toulouse avec l'idée de se spécialiser en gynécologie médicale. « Une spécialité qui a manqué de soutien politique dans les années 80, où elle a disparu purement et simplement, ce qui explique aujourd'hui une baisse préoccupante du nombre de praticiens. »

 

 

Avec le docteur Dominique Malvi, gynécologue albigeoise, qui a fondé le Comité de défense de la gynécologie médicale en 1997, Corinne Cantegrel s'engage activement dans la défense de sa spécialité au service de la santé et de la dignité des femmes. En 1999, une grande pétition nationale réunira plus de 400 000 signatures, rappelant l'importance de la gynécologie dans un contexte, où la contraception et la prévention des cancers et des maladies sexuellement transmissibles ne sont pas encore suffisamment l'objet de communication.

« Notre travail n'est pas d'influencer, mais d'informer, d'écouter, de conseiller les femmes pour leur permettre de décider en connaissance de cause. En cela, je me sens utile », résume Corinne Cantegrel. « Je ne suis pas là non plus pour rassurer ; je préfère être sincère et convaincre les patientes qu'il y a toujours une solution voire des solutions pour se sentir mieux dans son corps quel que soit son âge. »

Depuis son installation en 1983 à Carmaux d'abord, puis à Albi à partir de 2002, Corinne Cantegrel a suivi avec intérêt les évolutions en matière d'accompagnement et de traitement des femmes. « Aujourd'hui, beaucoup de patientes viennent parfois avec des idées préconçues ; certaines ont fait des   recherches sur internet ou ont reçu divers avis de leur entourage. Il peut y avoir une résistance quant au conseil médical ; l'échange et la confiance sont ici essentiels. » C'est que le sujet de la sexualité féminine souffre encore de tabous. Certes, la parole se libère, y compris sur la question des pratiques sexuelles comme la bisexualité, mais aussi sur les violences conjugales.

Le travail est aussi basé sur la prévention

« La pollution, les perturbateurs endocriniens, le tabac, la sédentarité ne sont pas sans effets sur la santé et la sexualité », insiste Corinne Cantegrel. « Il est prouvé, par exemple, que le tabac réduit les défenses immunitaires et augmente les risques de cancer du col de l'utérus sans oublier le cancer du poumon qui va devenir le premier cancer chez la femme...» Pour rester à jour en matière de recherche et de traitement, des formations continues sont organisées à l'intention des gynécologues du Tarn. Cela prend la forme de rencontres sur des thématiques pluridisciplinaires.

« Les interventions proposées avec d'autres professionnels permettent ainsi d'élargir notre horizon. » Corinne Cantegrel reconnaît qu'elle a toujours aimé apprendre. « Cela permet de garder les pieds sur terre et de se convaincre qu'on ne sait jamais tout.

Le quoditien d'un médecin, c'est de rester humble. » Corinne Cantegrel est aussi investie comme bénévole dans le Rotary Albi Pastel. « Nous avons pu récemment faire bénéficier à des enfants malades d'heures de soutien scolaire. J'ai contribué pour ma part à créer des passerelles avec le Centre d'information sur les droits des femmes et des familles à qui nous finançons des heures d'aides psychologiques pour des femmes victimes de violences conjugales. C'est une autre façon de s'impliquer pour sa ville et de se sentir utile. »

Autant de raisons de ne pas quitter Albi, « une ville agréable et attrayante, où j'ai ma famille et mes amis. »
À quelques mois de la retraite, elle se tourne résolument vers l'avenir. « Je compte bien en profiter, même s'il est encore difficile de se projeter », lance-t-elle malgré tout avec optimisme. Elle se réjouit déjà de pouvoir accorder davantage de temps à ses petits enfants et elle ne va pas bouder son plaisir de revenir au Grand Théâtre. « Je suis déjà une inconditionnelle de la Scène nationale. La culture, c'est l'émotion partagée, c'est un vrai bol d'oxygène. »

Fan de modern jazz, elle n'exclut pas l'idée de refaire de la danse dans une des écoles d'Albi. Le golf qu'elle a pratiqué en compétition pendant plusieurs années à Lasbordes n'est pas au programme. « C'était une belle page de ma vie et un beau dépassement de soi dont je garde un bon souvenir. » On se permettra de penser que le rêve de la jeune adolescente qu'elle fut dans les années soixante l'aura été aussi. De quoi inciter peut-être d'autres personnes à s'engager à leur tour pour les droits de la femme.