La famille Rivals, une affaire qui roule

Famille Rivals

Famille Rivals

© Tchiz

Nom
Rivals
Prénom
Éric, Isabelle, Romain et Lucas

Véritable institution albigeoise, les transports Rivals, c’est avant tout une affaire de famille lancée dans les années soixante. Aujourd’hui, cet acteur économique de premier plan rayonne bien au-delà du Tarn, mais à coup sûr, un colis expédié ou livré à Albi a de grandes chances de passer entre ses mains.

 

Dans la famille Rivals, je demande le père, la mère et les deux fils. L’histoire familiale, c’est Éric qui la raconte. « Mon père, Roger, comme mon grand-père travaillaient dans les mines de charbon à Carmaux. Après deux coups de grisou, mon père a décidé d’arrêter. Il s’est lancé dans le transport en assurant, avec un camion, des liaisons entre Albi et Toulouse. C’était en 1965. » En 1982, le 1er juillet précisément, Éric le rejoint comme chauffeur. « J’y suis allé par choix. C’était clair pour moi. Faut dire que j’avais été vacciné, petit, au gasoil ! » Adolescent, Éric « fait la ligne » avec son père entre Albi et Toulouse. « J’ai parfois passé mes vacances dans les camions ! »; Après quarante ans passés sur les routes, il connaît le Tarn par cœur.

 

L'heure de la retraite approche néanmoins pour Éric ; le chauffeur embauché avec lui, au début des années 80, vient d’ailleurs de quitter l’entreprise. Mais la relève est assurée. Éric s’apprête en effet à transmettre le flambeau comme son père l’avait fait avec lui en 1991. Éric avait alors diversifié l’activité, au point qu’aujourd’hui l’entreprise couvre l’ensemble de la chaîne, notamment le stockage. « Nous avons saisi les opportunités qui se présentaient avec l’objectif de toujours nous démarquer et de conserver notre fibre familiale. »

 

La relève est formée et prête

L’entreprise Rivals a commencé par un camion.
Elle compte aujourd’hui 143 véhicules, 83 employés dont une cinquantaine de chauffeurs qui travaillent pour plus de 400 clients réguliers et plusieurs centaines d’autres transporteurs. Cela va du particulier qui veut expédier un colis, aux commerçants et aux industriels qui nous confient régulièrement leurs marchandises. Parmi eux, les vignerons de Gaillac. « Ma mission consiste souvent à trouver des solutions et à régler les problèmes », résume Éric. « Pour cela, il faut être réactif et savoir s’adapter à chaque situation. »

 

Les fils, Romain et Lucas, étaient à bonne école et n’arrivent pas sans bagages. Les deux ont suivi des études en lien avec les transports et la gestion logistique. Romain, 25 ans, s’est spécialisé dans le management, mais aussi la « supply chain ». Derrière cette notion technique, il y a toute la chaîne d’approvisionnement qui couvre, notamment, la maîtrise des coûts de livraison, l’anticipation de la demande et la gestion des stocks. Pour mettre en pratique ce qu’il avait appris, son père lui avait  confié le soin de suivre de A à Z la création d’un entrepôt. Pari gagné. Lucas, 23 ans, termine son master en management gestion d’entreprises en travaillant justement sur la reprise de la société. De la théorie à la pratique, là encore il n’y a qu’un pas. Et Éric de conclure. « Le plus difficile est sans doute de trouver le juste milieu : il faut les laisser voler de leurs propres ailes tout en n’étant jamais trop loin si besoin. »

 

En attendant, il prend le temps de réfléchir aux nouvelles orientations à prendre. « Le transport par camion existera toujours, même avec le développement des circuits courts. » Après le Covid et avec la crise économique actuelle, pas facile cependant de se projeter. L’activité est en baisse actuellement après une période plutôt dynamique, notamment pendant le confinement. « L’entreprise n’avait pas arrêté son activité », se souvient Romain. « La nuit, sur les routes désertes, c’était presque flippant ! »

 

Plusieurs milliers de tonnes transportées par mois

Sur le quai de chargement de l’entreprise, installée depuis 2011 derrière la Safra, c’est une véritable fourmilière. Le hangar est plein de marchandises sur le point d’être chargées. De la baie vitrée qui domine le dépôt, on aperçoit de l’ail, des palettes de vins et des centaines de cartons. À l’approche des fêtes de Noël, l’activité est importante.

« Les produits ne restent pas ici plus de 24 heures. Ce soir, le dépôt sera vide », explique Isabelle. Chaque mois, ce sont plusieurs milliers de tonnes qui transitent ici. La plate-forme albigeoise travaille avec d’autres, réparties sur le territoire, sur le principe des hubs des aéroports. « Les marchandises proviennent du monde entier et partent parfois vers des destinations lointaines », note Éric.

Il y a parfois des « colis » plus insolites comme cette voiture, pièce à conviction dans une enquête judiciaire, qu’il faut acheminer à Toulouse, ou l’ensemble des produits Saveurs du Tarn destinés au Salon de l’agriculture. « À l’époque du Covid, nous avons été aussi amenés à transporter des masques, escortés par la police ! Ça valait de l’or ! »

 

Des camions qui roulent au colza

Montré du doigt pour son impact environnemental, le camion a évolué dans le bon sens. Éric prend l’exemple de leur camion électrique qui circule depuis onze ans dans le centre-ville pour assurer les livraisons. « Nous étions visionnaires ! Nous avions testé un prototype et avions fait le pari d’en acheter un. » Depuis, Rivals essaye de réduire son empreinte environnementale avec un meilleur tri des déchets, des panneaux photovoltaïques et surtout l’usage, pour un quart de ses camions, d’un biocarburant, l’Olea, à base d’huile de colza. « C’est 60 % d’émissions de gaz à effet de serre en moins dans l’air et 80% de particules en moins également. » Avec 120 000 km parcourus en moyenne chaque année par un camion, la différence n’est pas négligeable. « Nous avons choisi cette solution de transition en attendant que des technologies comme le moteur à hydrogène soient plus performantes. »

 

C’est avec ce biocarburant que Romain et Lucas roulent à bord de leur camion de compétition depuis maintenant quatre saisons sur les circuits français. « Nous avons toujours assisté aux grands prix qui avaient lieu à Albi et dans d’autres villes », note Romain. Après avoir piloté des karts, ils sont passés aux courses auto en endurance puis en sprint. « En 2019, nous avons testé le pilotage d’un camion », explique Lucas. « Nous avons eu ensuite la surprise d’être contactés par une écurie et recrutés pour la saison suivante. Par la suite, nous avons créé notre propre écurie, Albi motor rowing. » « C’est une belle aventure familiale » ajoute son frère, « mais aussi un sport d’équipe qui implique des bénévoles passionnés et des sponsors », indique Romain.

 

Le boulot en famille

Et le travail en famille, pas trop compliqué ? À cette question, les parents et les enfants partagent la même vision. « Chacun son rayon ; on ne se marche pas sur les pieds. » Isabelle est à la comptabilité, Éric aux relations clients avec Lucas, Romain à la partie exploitation et gestion du matériel et des équipes. « C’est important de bien communiquer et de savoir couper une fois à la maison », explique Isabelle. « On ne parle pas boulot le soir ! » Son mari complète : « J’éteins mon téléphone quand il le faut surtout qu’on est en permanence sollicité par des clients qui veulent savoir en temps réel où est leur colis et quand il arrivera. » On comprend la pression et le stress.

 

Finies néanmoins pour Éric les journées qui commencent à 5h et finissent tard.

« L’idée n’est pas de partir du jour au lendemain. Je continuerai à assurer avec Lucas les relations avec les grands comptes. Quarante années, forcément, permettent de créer un réseau et de tisser des liens étroits basés sur la confiance avec les clients et les partenaires. Ils sont rassurés que l’entreprise reste au sein de la famille. »

On peut compter sur Romain et Lucas, la nouvelle génération Rivals, pour tenir cet engagement.

 

■ AM256 - DÉCEMBRE 2022/JANVIER 2023