Jean-Pierre et Stéphane Frontoni

Frontoni père et fils
Nom
Frontoni
Prénom
Jean-Pierre et Stéphane

Un air d'Amérique flotte sur le garage Frontoni, dont l'histoire commence à l'ère des stations essence des années 70 et se poursuit avec des voitures de légende que l'équipe de mécanos passionnés prend plaisir à restaurer. Parmi eux, Jean-Pierre et Stéphane Frontoni, père et fils.

Il y a ceux qui sont tournés vers les nouvelles technologies, le tout électrique, le tout numérique et les gadgets dernier cri. Et il y a ceux qui aiment plutôt les objets qui ont une histoire avec un brin de nostalgie pour une époque révolue. Au garage Frontoni, une institution avenue François Verdier, le père comme le fils incarnent cet esprit vintage. L'enseigne et la façade du garage, qui pourraient rappeler les stations-service éparpillées sur la route 66 aux États-Unis, donnent déjà le ton, tout autant que le logo représentant un cochon motard avec tatouage et casquette.

Les voitures - qu'on qualifie dans le milieu de "Classics cars" - stationnées de part et d'autres du garage lèvent le doute. La passion pour les américaines n'est pas une légende. "Il y a une ambiance, un état d'esprit comme nulle part ailleurs", confirme Stéphane Frontoni.

Des Niçois dans le Tarn

Bien avant cet engouement pour les moteurs comme on en fait plus, l'histoire de la famille Frontoni nous entraîne d'abord en Italie. C'est Jean-Pierre, 80 ans, la mémoire du garage qui raconte. "Mon père et mon grand père étaient ébénistes à Nice. La famille originaire de Rome s'était installée là-bas au début du siècle."

Le fils se destine à la mécanique et est recruté dans un garage en 1858. Il a quinze ans. "En 1965, je pars en voyage de noces dans le Tarn, où était née ma femme. Nous avions rejoint les cousins à Lautrec ! Dans les années qui ont suivi, l'idée de partir de Nice fait son chemin. À cette époque, c'était difficile financièrement de s'installer et d'ouvrir son propre garage." Le projet de venir à Albi prend alors forme. Le groupe Elf lui proposant de gérer une station essence est l'occasion pour le jeune couple et son enfant de faire ses valises.

De cette période, Jean-Pierre conserve quelques vieilles photos où on l'aperçoit devant des voitures comme cette splendide Simca Vedette Versailles ou cette Renault Floride entrées toutes les deux dans la légende auto.

En 1970, l'avenue François Verdier est la porte d'entrée d'Albi pour ceux qui viennent de Toulouse. "C'était la route nationale", rappelle Stéphane, né à Nice en 1967. Rien que sur cette longue ligne droite, pas moins de neuf stations essence se succédaient. Jean-Pierre gère la sienne avec sa femme. Il est à la fois à la pompe pour servir les clients, regonfler les pneus et laver les pare-brise. Il aménage aussi un garage pour des petites réparations et entretiens.

La station, derrière laquelle se trouve la maison familiale, ouvre encore sur les champs à perte de vue. En 1973, Jean-Pierre engage de gros travaux de modernisation et d'extension. En 1984, Elf décide la fermeture de la station essence. L'arrivée des supermarchés entraîne une chute de la clientèle. L'occasion de développer réellement l'activité garage et la mécanique pure.

Présents à l'atelier dès 6h30

Durant les années 80, le fils Stéphane se tourne lui aussi vers la mécanique auto. "Pas vraiment par vocation" reconnaît-il. "Même si je baignais dans l'automobile depuis mon enfance, je rêvais plutôt de devenir archéologue, de voyager et d'explorer le monde." C'est un stage chez Peugeot Talbot Sport sur la mise au point des moteurs à injection qui va être un déclic.

Avec une formation mécanique au lycée Rascol, il rejoint son père au garage. "Il y avait du travail et l'automobile connaissait un développement sans précédent".

Aujourd'hui, le garage tourne à plein régime. Jean-Pierre, à la retraite depuis plusieurs années, n'est jamais bien loin. Comme son fils, ce sont les premiers à arriver, généralement autour de 6h30... Tous les deux n'hésitent pas à mettre la main dans le cambouis. "Je continue d'apprendre", souligne d'ailleurs Jean-Pierre, aussi passionné par le métier qu'il y a cinquante ans. "L'électrique me dépasse un peu, mais les jeunes au garage me montrent."

Si les véhicules modernes sont les bienvenus, la vente et l'entretien de voitures anciennes, essentiellement d'origine américaine, sont la marque du garage depuis bientôt vingt ans. L'aventure débute par la passion de Stéphane pour les États-Unis, où il se rend régulièrement. "J'aime ce pays pour son atmosphère, sa musique, sa liberté d'entreprendre, même si l'argent est roi et que je ne voudrais pas y vivre."

Lors de ses voyages, il évite d'ailleurs les sentiers battus par les touristes et privilégie les États comme le Nevada, le Nouveau Mexique ou encore l'Utah, où l'on ressent encore l'esprit américain. Collectionneur aguerri, il profite d'ailleurs de ces séjours pour dénicher quelques objets vintage qu'il se réjouit d'installer chez lui.

"Les USA, c'est ma vie. Chez moi, c'est un musée !" Il aurait quelques années de moins, il aurait bien créé à côté du garage un motel comme on en trouve encore aux USA.

Des œuvres d'art sur quatre roues

C'est un peu par hasard qu'il réceptionne en 2005, via un intermédiaire franco-américain, une dizaine de "classics cars" et les vend comme des petits pains. Depuis, de vieilles Ford Mustang, des GMC et des Chrysler, pour ne citer que les marques les plus connues, font un passage au garage Frontoni, soit pour être vendues à des collectionneurs, soit pour y être restaurées.

"Des clients viennent parfois de loin. Certaines voitures sont des œuvres d'art et font partie du patrimoine", souligne Stéphane devant une magnifique Mustang, dont il reste à installer le moteur. "Chaque voiture a une histoire ; j'aime bien en parler. Cela donne l'impression de remonter le temps."

Les quatre mécanos du garage pratiquent de plus en plus ce qu'on appelle le restomod qui consiste à moderniser une voiture ancienne en y intégrant les dernières technologies.

La place manque un peu et de gros travaux sont prévus pour réaménager le garage. Mais quand on aime, on ne compte pas. "Travailler sur ces véhicules est passionnant. C'est de la vraie mécanique qui exige aussi un travail d'équipe, beaucoup de rigueur et de finition. Il faut être aussi curieux et aimer se documenter. On fait rêver les gens. Ça  crée des liens. C'est aussi valorisant de redonner vie à un véhicule."

Ambiance nostalgie chez les Frontoni, on vous l'a dit.