Michel Albarède, ancien avocat et élu de la Ville

Michel Albarède
Nom
Albarède
Prénom
Michel

Élu de la Ville d'Albi de 1983 à 2014, conseiller général pendant près de vingt ans, l'ancien avocat Michel Albarède, à la retraite depuis quelques semaines, ouvre son album de souvenirs et revient sur ses divers engagements au service de la ville d’Albi et des Albigeois.

Tenue décontractée, mais toujours avec l'élégance qu'on lui connaît, Michel Albarède arrive en mairie avec ses dossiers sous le bras. Il ne s'agit pas d'affaires judiciaires ni de dossiers relevant de la Ville d'Albi ou du Département. Il est venu avec un concentré de sa vie professionnelle, politique et associative, constitué de photos, d'articles de presse et d'archives, sources d'anecdotes prometteuses. Depuis 2015, il a définitivement quitté la politique - tout en s'y intéressant toujours - et voilà quelques semaines à peine qu'il a plaidé son dernier procès. « J'aurais pu continuer, mais il faut savoir s'arrêter à temps et passer le relais. » À 74 ans, il n'exclut pas d'écrire un jour ce que certains considéreront comme ses mémoires. « Pour le moment, je n'ai pas assez de recul. » 

Pour le magazine Albimag, il s'est prêté néanmoins à l'exercice d'introspection avec spontanéité et une liberté de parole qu'il peut se permettre davantage aujourd’hui. Point de cravate ni de robe d'avocat. Le vieux loup de mer a matière à raconter. « Pour chaque avocat, il y a des dossiers qui marquent. Pour moi, il y a eu les dossiers de santé publique relatifs à l'amiante et au Mediator. De vrais combats.»

Pour le premier comme le second, Michel Albarède a accompagné des victimes jusqu'à ce que la justice reconnaisse et condamne les responsables, qu'il s'agisse d'entreprises ayant exposé en connaissance de cause leurs employés au contact de l'amiante ou des laboratoires Servier qui produisaient ce fameux médicament coupe faim
aux effets désastreux. « Les démarches ont été longues. Les victimes étaient souvent des gens sans histoire, des cabossés de la vie, des traumatisés, qui ont parfois subi des pressions pour qu'ils se taisent. »

De vrais combats

Pour l'amiante, ils ont obtenu gain de cause ; pour le Mediator, Michel Albarède a eu la chance de collaborer avec Irène Frachon. Pneumologue au CHU de Brest, elle est la spécialiste du sujet et son travail a été décisif dans la reconnaissance de la toxicité du médicament. « Une femme extraordinaire », souligne l’ancien avocat qui l'avait accueillie à Albi pour examiner l'ensemble des dossiers qu'on lui avait confiés. En 2011, la bataille juridique avait abouti à la création d'un fonds d'indemnisation pour les victimes. L'affaire n'est pas finie, puisque les plaidoiries de la défense au procès en appel des laboratoires Servier se sont tenues en juin dernier. Verdict en décembre pour savoir si le parquet général obtiendra ce qu'il demande. En dehors des dossiers d'envergure qui étaient bien médiatisés, Michel Albarède a aussi géré ceux du quotidien. « Des divorces, de la petite délinquance, mais aussi des cas sordides ou dramatiques : meurtres, viols, homicides involontaires. J'ai rarement refusé un dossier, même les plus lourds. J'ai toujours essayé de percevoir la part d'humanité dans chacun de mes clients. »

Aujourd'hui à la retraite, Michel Albarède, l'hyperactif, appréhende un peu cette nouvelle page de sa vie (même s'il a de quoi faire avec ses dix petits-enfants). Une vie qui a débuté à des milliers de kilomètres du Tarn. Son père était militaire et avait participé à la guerre d'Indochine. Lorsque son troisième et dernier fils naît en 1949, il est au Laos. « J'ai appris à faire mes premiers pas sur un bateau à destination de la France », précise Michel Albarède.
Bien des années après, il reviendra avec son frère sur les traces de son passé. « Pour mon frère, le Laos a été un déclic. Il s'est converti d’ailleurs plus tard à la
religion bouddhiste et est même devenu un bonze reconnu. » Cartésien, pragmatique et résolument athée, Michel Albarède ne l'aurait pas suivi.

Élève dissipé... au talent d'orateur

Au début des années cinquante, la famille s'installe à Caussade, puis à Albi. Le jeune garçon est élève à l'école de la Temporalité, située derrière la cathédrale, puis passe par Rascol et Lapérouse. Parmi les documents d'archives qu'il a conservés, ses résultats du bac le font sourire. Admis mention passable avec un 8 en maths, il tient à préciser que l'année de terminale avait été un peu perturbée. Et pour cause, c'était en 1968 ! Plus à l'aise dans le domaine littéraire, on devine déjà à ses notes un goût prononcé pour le verbe. En seconde, il reçoit le premier prix en récitation, témoignant de ses prédispositions à l'oral. « J'étais sinon un élève plutôt dissipé », nuance-t-il non sans un brin d’autodérision. « Mes parents, bien qu'Albigeois, s'étaient même arrangés pour me placer en internat au lycée Lapérouse ! »

Après le bac, il s'oriente vers le droit. Sa carrière d'avocat débute dans les années 70, lorsqu'il rentre comme stagiaire au cabinet de Paul Bonnecarrère. Le jeune avocat y fait ses armes avant de voler de ses propres ailes quelques années plus tard et de s'associer à d'autres confrères parmi lesquels
Jacques Valax. Maître Albarède trace son chemin, fonce et s'impose dans un milieu un peu conservateur.

Fondateur du service communication de la mairie

Et la politique ? Son engagement débute alors qu’il est encore étudiant. Pour financer ses études, il travaille comme pion au collège Balzac et anime des colonies de vacances pour la Fondation des oeuvres laïques. C'est à cette époque qu'il fréquente des militants engagés à gauche et que son orientation politique se précise. Il est d'ailleurs approché pour rejoindre la liste de Michel Castel, candidat aux élections de 1977, mais il refuse. Michel Albarède entre en politique lors du deuxième mandat du maire sortant, réélu en 1983 puis en 1989. Avec l'étiquette du Mouvement des radicaux de gauche, il s'engage activement pour la Ville d'Albi. On lui doit la création du service communication, conscient de l'importance d'informer et de rendre ce service à la population. De cette période, il n'oublie
pas la visite de François Mitterrand et plus encore de Bernard Tapie, qu’il avait invité à l’occasion des élections européennes en 1994. Porté par des valeurs d’humanisme, il prend à coeur son rôle d'élu avec la volonté « d'être à l'écoute, de servir l'intérêt public et d’améliorer le cadre de vie des gens ».

Il tient bon la barre

En audience comme en conseil municipal, l'homme était dans son élément. À l'aise pour monter à la barre et la tenir fermement quand il le faut, il argumente, parfois « aboie » avec quelques réparties et piques dont il a le secret. Pour autant, il sait reconnaître ce qui a été réalisé par les maires précédents.
« On doit, par exemple, à Michel Castel la création de l'université dans l'ancienne caserne, la piétonnisation du centre-ville ou encore l'École des mines. Sur ces projets, qui n'ont pas toujours fait l'unanimité, il a été vraiment visionnaire. Je retiens des mandats de Philippe Bonnecarrère l'inscription de la Cité épiscopale au patrimoine mondial, les places du Vigan et Sainte-Cécile, la restructuration du musée Toulouse-Lautrec et les Cordeliers. »

La politique n'est pas un long fleuve tranquille. En 1995, Michel Albarède se retrouve dans l'opposition et mène au conseil municipal de mémorables joutes oratoires avec son confrère avocat fraîchement élu. Il remporte trois ans plus tard le canton d'Albi Sud aux élections départementales. Il y restera jusqu'en 2015. Entretemps, en 2008, il se présente aux élections municipales. Échec. L'homme garde la tête haute, regrettant néanmoins, y compris dans son camp, les critiques et autres mesquineries dont il a parfois fait l'objet.

La belle histoire du golf d'Albi

L'homme a toujours été passionné par le golf. Il ne cache pas sa satisfaction d'avoir contribué à la création du golf de Lasborde fin des années 80. « C'est une belle histoire dans laquelle un groupe de copains s'est beaucoup investi », résume Michel Albarède, qui est encore président de l'association des membres fondateurs du golf. « Il reste un golf de référence avec un des meilleurs parcours d'Occitanie. Il manque juste un hôtel sur place pour qu'il soit parfait. » Michel Albarède était aussi licencié au Tennis club albigeois et même engagé dans le judo qu'il avait pratiqué adolescent. « Hélas, j'ai préféré fréquenter les discothèques avec les copains et les copines plutôt que de décrocher ma ceinture noire. » Si la vie est un combat, on la lui accordera bien volontiers.